Le Canada est-il en passe de devenir un champion du stage non rémunéré ? Actuellement plusieurs centaines de milliers de personnes travaillent gratuitement dans les entreprises du pays. Un chiffre qui trouve son origine dans les conséquences de la crise de 2008.
Les organisations estiment que près de 300 000 personnes travaillent actuellement sans être rémunérées au sein d’entreprises canadiennes d’envergure. Le nombre de ces stagiaires bénévoles a grimpé en flèche depuis la crise économique de 2008. Néanmoins, les jeunes canadiens et leurs parents remettent de plus en plus cette tendance en question, qu’ils apparentent à des pratiques du 19e siècle, d’après Sean Geobey, auteur du rapport The Young and the Jobless et chercheur associé au Centre canadien de politiques alternatives. L’an passé, un hôtel de Colombie-Britannique avait déclenché l’indignation de l’opinion publique après la publication d’une annonce indiquant qu’il recherchait des personnes prêtes à débarrasser gratuitement les tables de l’établissement. Cette offre d’emploi non rémunérée avait ensuite été retirée rapidement après le tollé qu’elle avait généré sur Internet.
Une réglementation inadaptée
Le stage non rémunéré engendre ainsi des écarts socio-économiques. Car si les jeunes issus de familles aisées peuvent assumer un emploi non rémunéré, les autres ne peuvent pas se le permettre. Ces stages bénévoles finissent donc par peser lourdement sur le taux de chômage de la population des jeunes Canadiens, comme le rappelle l’étude The Young and the Jobless qui prend en exemple l’Ontario. Par conséquent, ces mauvaises pratiques empêcheraient les jeunes du pays de prendre pleinement part à l’économie nationale. Si les pouvoirs américains ont commencé à s’attaquer au problème, les Canadiens ne disposent pas encore d’une réglementation idoine qui s’appliquerait à l’ensemble du territoire. Un député canadien a déposé l’an dernier un projet de loi d’initiative parlementaire en ce sens pour contrecarrer ces emplois déguisés. Le ministère du Travail répond pourtant qu’il existe bel et bien de lois dans le Code du travail tendant à protéger les stagiaires. Si une plainte est déposée pour des rémunérations, des vacances ou des heures supplémentaires non payées, un enquêteur ministériel peut être mandaté pour effectuer une enquête de vérification auprès de l’employeur. Toutefois ces réglementations restent inefficaces : puisque un jeune professionnel en début de carrière ne dénoncera pas son employeur potentiel ou réel, si ce dernier est en faute, par peur d’être par la suite mis sur liste noire.